“L’artiste est une exception : son oisiveté est un travail, et son travail un repos.” disait Honoré de Balzac. Pourtant, la journée de la procrastination est récente. Inventée en 2010 par David d’Equainville, fondateur des éditions Anabet, elle fête sa 7ème édition. Et son site Internet aussi, entièrement dédié à cette pratique qu’il présente comme une forme de révolte positive : « La procrastination, c’est une défense immunitaire face à une société extrêmement rude, un moyen positif de se défendre des assauts du monde contemporain. ». Côté sémantique, le mot vient du latin Procrastinio et signifie « remettre à demain ». La procrastination consiste simplement à reporter systématiquement ce qu’on aurait pu faire le jour même… Mais qu’on peut encore réussir à faire demain ! Une manie pas bien méchante à petite dose, mais qui, à fréquence pathologique, devient insupportable pour soi comme pour l’entourage.
“A l’époque d’Internet, des jeux vidéos et des réseaux sociaux, il est plus difficile que jamais de rester concentré à sa tâche et d’éviter les distractions”, nous explique Piers Steels. On risque bien moins l’égarement quand on est serveur, ouvrier ou vendeur, c’est-à-dire constamment en interaction avec son univers et les autres.
Les métiers du numérique demandent une aptitude à se recentrer en permanence
Les créatifs sont repérés pour un talent et une intelligence qui ne disent rien de la personnalité souvent désorganisée, dissipée ou très dynamique de certains profils catapultés d’office derrière des bureaux. Contrairement aux métiers physiques et systématiques, les métiers du numérique demandent une aptitude à se recentrer en permanence -surtout dans un open space – et un sens de l’auto-discipline pas toujours inné. La procrastination passagère est une conséquence inévitable, mais vertueuse si elle est modérée et non subie : une déconnexion brève et volontaire peut rompre un bug. En revanche, une déconnexion longue et imprévue n’est jamais bon signe ! Vous êtes votre propre maître et vous avez le droit, parfois, de vous envoyer paître. L’autonomie est une liberté qui prend sa valeur si on sait la gérer !
Procrastination involontaire : c’est pas moi, c’est ma boîte !
La procrastination peut être induite par des problèmes d’organisation générale subis par les salariés. Réunions intempestives, pannes informatiques, espaces de travail mal conçus, trop bruyants, mauvaise circulation des informations, mauvaise répartition de la charge de travail et des délais, désynchronisation du travail en équipe, accumulation d’attributions incompatibles, surcharge de sources d’information réclamant un contrôle constant sont quelques-uns de rouages paresseux qui obligent sans cesse à couper ses élans et remettre à plus tard ce qu’on aurait bien fini maintenant !
Ainsi, 86% des Français estiment perdre du temps au travail, non de leur fait mais à cause d’une mauvaise organisation et de mauvaises conditions de travail. Parmi les éléments qui nuisent à une bonne organisation, les sondés citent à 59,7 % une mauvaise communication interne et la répartition du travail, à 50 % les niveaux hiérarchiques trop nombreux, et à 36,5 % les réunions trop fréquentes (étude easy panel.) Les nuisances sonores au travail feraient perdre 30 minutes de productivité par jour par salarié et engendrerait une perte financière de près de 23 milliards d’euros par an (enquête IFOP/JNA)
La procrastination en quelques chiffres
– On évalue à 3891 euros le coût annuel par salarié qui perd une demi-heure par jour.
– Les salariés consacrent 1,5 à 3 heures par jour à faire autre chose que leur travail.(Empty Labor, Roland Paulsen)
– 95% de la population mondiale serait victime de procrastination passagère (selon une étude de Piers Steel, professeur à la Haskayne School of Business de l’Université de Calgary)
– 20% de la population mondiale est atteinte de procrastination chronique (selon une étude du professeur Joseph Ferrari de l’Université de DePaul à Chicago)
– L’évolution de nos modes de vie a entraîné un accroissement de 300 à 400% du phénomène sur les 40 dernières années (selon une étude de Piers Steel, professeur à la Haskayne School of Business de l’Université de Calgary)
La recette anti-procrastination : faites le point !
– Ecoutez vos petites voix ! Mais si, vous savez très bien de qui on parle. On a les mêmes ! Et elles ne sont pas toutes bonnes conseillères. Les permissives vous incitent à raison à reporter : “ce n’est pas encore mûr, j’ai besoin d’y revenir avec du recul”. Ecoutez-les ! Les anxiogènes vous incitent à tort à dériver : “tu ne vas pas y arriver, laisse tomber, même plus envie de voir ça”. Non mais vous n’allez pas vous laisser avoir encore une fois ! Elles ronchonnaient déjà sur vos cahiers d’écolier et ne connaissent rien au numérique. Ne vous occupez pas d’elles et remobilisez-vous : vous allez y arriver.
– Ménagez vos impulsions en éloignant les sources de plaisir immédiat – smartphone perso, musique, grignotages, pauses café/cigarette qu’il vaut mieux planifier pour qu’elles ne se muent pas en fuite… La tentation du bien-être passager (même si on sait qu’on en subira les conséquences) est irrésistible quand elle s’offre comme seule alternative aux tâches les plus ingrates.
– En revanche, offrez-vous de vraies pauses : elles sont indispensables ! Sortez prendre l’air, vous défouler (courir ou faire des pompes libère merveilleusement des blocages psychologiques), rangez votre espace de travail, assumez votre pause goûter devant le meilleur de l’actu IT ! Se refuser ces temps pour obéir à la culture du “complètement charrette” n’aboutit qu’à vous démotiver aux pires moments. La qualité de votre travail dira votre investissement : ne perdez pas de temps à “montrer” que vous travaillez et véhiculez l’image bien plus valorisante d’un passionné qui s’éclate dans son job et assure sans se laisser déborder. Retrouvez le plaisir au travail ! C’est une telle priorité qu’on en a fait un métier !
– Soyez moins exigeant envers vous-même. Apprenez à gérer votre stress en l’affrontant. Sachez reconnaître vos limites et vivre l’erreur comme une étape, non un échec. Vous ne vous laisserez plus duper par toutes ces bonnes raisons d’ajourner la difficulté qui sont autant d’excuses formulées par vos angoisses. Demain, vous n’aurez plus le choix, et vous y arriverez tant bien que mal. mais aujourd’hui, sans la pression du délai, vous pourriez même vous dépasser et surprendre.
– Le premier ennemi : les montres, les horloges, le temps linéaire qui vous obsède car matérialise ce qui vous sépare de moments plus agréables de la journée ! Gardez toujours en tête qu’il existe un temps inerte et un temps domptable; le temps psychologique, celui qu’on trouve rapide ou lent ! Or, bonne nouvelle ! Plus vous êtes actif, efficace, plus ce temps passe vite ! En réalité, la procrastination ne récompense que par l’ennui et la culpabilité, et vous remet dès le lendemain devant vos responsabilités !
– Débarrassez-vous d’un maximum de sources de procrastination : fermez les fenêtres inutiles sur vos navigateurs, réduisez au maximum l’encombrement sur vos bureaux virtuel et réel et faites le même tri dans vos tâches de travail : commencez par le plus important sans vous laisser détourner par des missions annexes plus concrètes mais sans importance.
– Imposez-vous un rythme et des buts comme pour un sport : cela vous entraînera dans une dynamique stimulante et vous verrez mieux le fruit de votre travail et vos progrès.
– Ayez davantage confiance en vous pour décider plus rapidement : l’hésitation non seulement ronge les meilleures volontés mais incite à stagner, à ne rien décider, or ne pas choisir c’est choisir ses doutes comme gouverneurs, renier ses compétences par peur de l’erreur.
– Apprenez à dire NON ; n’acceptez pas automatiquement toutes les petites missions annexes qui vous détournent de votre métier. Ni bonne poire, ni super-héros : soyez pro !
– Si tout cela ne vous soulage pas, vous êtes peut-être atteint d’un trouble du déficit attentionnel, souvent associé à un problème d’hyperactivité. Si cette tendance est une souffrance, ayez le bon réflexe et le bon sens de consulter un spécialiste : des solutions adaptées existent !
– Précrastinez ! Remettre au lendemain, c’est avoir chaque jour à faire en retard ce qu’on aurait dû faire la veille. Autant de travail mais plus de stress ! Inversez la balance et soyez à l’image de votre métier : en avance sur votre temps !
Pour aller plus loin :
– N’attendez pas demain pour trouver le boulot de vos rêves, nous sommes là pour vous aider : vivre sa passion au quotidien (art et culture, voyage, jeux vidéo…). Un job sur-mesure, c’est l’assurance de ne plus jamais vouloir remettre à plus tard ce qu’on a ENVIE de faire maintenant !
– Comment améliorer le bonheur dans votre boîte ? Demandez au Chief Hapiness Officer !
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