Les cinq principaux candidats à l’élection présidentielle 2017 se savent attendus sur le sujet du numérique. Leur stratégie IT sur les cinq ans à venir sera cruciale. Si certains se contentent de vernir leurs programmes d’une touche futuriste, d’autres semblent maîtriser le sujet… comme de vrais geeks ! Revue de détails – alphabétique – sur leurs accointances 3.0 et plus si affinité.
François Fillon – Golden geek !
Ses coups de com’ : tradi mais trendy, François Fillon, qu’on a pu voir fureter dans les allées du dernier CES de Las Vegas, est un client assumé et passionné des nouvelles technologies. « Dès qu’un nouvel ordinateur MacBook Pro sort, il se précipite pour l’acheter », confie, amusé, un de ses collaborateurs. L’ancien Premier ministre possède de nombreux ordinateurs, un iPhone 7, un iPad avec lequel il guide son cher drone et une montre connectée Garmin. Il dévore la presse spécialisée high tech et se revendique précurseur : il affirme avoir découvert Internet dès 1993 et avoir formé ses proches collaborateurs (dont Juppé). Il adore également réparer les PC HS. Consommateur donc, clairement, mais acteur du changement ?
Sa vision :
Elle est dominée par les enjeux économiques et de souveraineté numérique face aux GAFA : faire de l’innovation une poule aux œufs d’or et affirmer, grâce à elle, une position internationale de leader. Très peu de propositions sur la culture, l’éducation, l’inclusion numérique et l’e-démocratie.
Ses mesures :
– Autonomie stratégique et cybersécurité : programme d’appels à projets européens dans l’intelligence artificielle et la blockchain.
– Créer un écosystème franco-allemand puis européen du financement de l’innovation.
– Education : transformer le cours de technologie du collège en cours de culture numérique, recruter des enseignants en informatique et introduire un module numérique dans toutes les formations supérieures.
– Accélérer le déploiement de la fibre d’ici à 2022 et initier un « Plan 5G ».
– Dématérialisation administrative : identifiants numériques uniques et poursuite du déploiement open data dans les services publics.
– Faciliter l’entrée des objets connectés et de l’IE dans le domaine de la santé.
Benoît Hamon – Utilisateur libre
Ses coups de com’ : Il reconnaît pleinement l’importance du numérique, mais pour faire avancer la société plus que pour créer le buzz : « C’est un outil formidable pour renouer le dialogue dont on a tant besoin à l’heure où notre démocratie va mal. C’est un atout pour créer une société plus collaborative, c’est pour cela que je propose aux français de contribuer à l’écriture de mon programme présidentiel sur : conseilcitoyenhamon2017.fr. » (source : CivicTech). Il utilise les réseaux sociaux avec parcimonie, mais non sans humour ! Pour l’anecdote, un internaute a créé un compte twitter pour ses lunettes (qu’il passe son temps à enlever), afin qu’elles puissent exprimer leur sentiment d’abandon. Benoît leur a répondu et les invite officiellement avant ses déplacements.
Sa vision : « Il y a ceux qui pensent que le progrès technologique va permettre d’augmenter les profits et les richesses, et ceux qui, comme moi, considèrent qu’il doit améliorer la vie des gens » (Le Parisien, l6 mars). Pour lui, le numérique est un levier pour résorber les inégalités et créer « un futur désirable ».
Ses mesures :
– Taxer la valeur ajoutée constituée par le travail des robots pour financer un Fonds de transition travail (FTT) dédié aux personnes dont le travail a été supprimé.
– Favoriser la transparence des administrations en donnant « un large accès » aux « citoyens, chercheurs et journalistes » en matière de données publiques.
– Numérique pour tous : stratégie d’inclusion numérique, très haut débit fixe et mobile partout.
– E-démocratie : co-construction de certaines lois avec les citoyens.
– Lutter contre « l’ubérisation débridée » et assurer à tous les actifs le même niveau de protection sociale.
– Renforcer la Bpifrance pour aider les TPE-PME-PMI ; création d’une monnaie alternative inter-entreprises pour échange de services sans mobilisation de trésorerie.
– 3 % du PIB dédié à la recherche et développement ; création d’un Crédit innovation sociale.
– Plan « Hôpital digital 2022 ».
Marine Le Pen – Noob en formation accélérée !
Ses coups de com’: Marine Le Pen ne veut pas laisser le monopole des nouvelles technologies à Jean-Luc Mélechon et à son hologramme. Du coup, elle aussi mise sur la réalité augmentée. Le FN a sorti, vendredi 24 mars, l’application « Marine plus », qui donne vie aux documents de campagne de la candidate à l’élection présidentielle, indique LCI. Plutôt très méfiante à l’égard du progrès, elle joue le jeu néanmoins, consciente des portes qu’elle pourrait se fermer. Elle a par exemple accepté de dévoiler sa culture dans le domaine en répondant à l’interview décalée du magazine Geek – actuellement en kiosque. Elle s’est ainsi imaginée à affronter des zombies ou les orques du Seigneur des anneaux. On y apprend notamment que, si elle avait la machine à remonter le temps d’H.G. Wells, elle irait voir Jeanne d’Arc pour lui annoncer qu’elle s’apprête « à sauver à (son) tour la France ». Son super-héros? Daredevil, l’homme aveugle qui fait la justice à New York. Film culte ? Interstellar de Christopher Nolan. Quand on lui demande ce qu’elle ferait dans la « Moria », la cité souterraine des Nains dans le Seigneur des Anneaux, elle précise qu’elle préférerait y aller…avec toute son équipe de campagne !
Sa vision : elle ne consacre au numérique qu’une dizaine de propositions sur 144 et son approche du sujet reste très vague. Ses propositions se concentrent sur la protection des données personnelles, le financement de l’innovation et de la culture, et pour la plupart n’apportent pas de grands changements par rapport à l’existant.
Ses mesures:
– Pour « garantir » la liberté d’expression et les « libertés numériques », elle prévoit leur inscription parmi les libertés fondamentales protégées par la Constitution. Elle souhaite aussi « renforcer la lutte contre le cyber-djihadisme et la pédo-criminalité » sans préciser par quels moyens.
– Obligation pour les entreprises de stocker les données des clients dans des serveurs localisés en France.
– Créer un secrétariat d’Etat consacré aux mutations économiques, rattaché au ministère des Finances, pour anticiper les évolutions du travail.
– Concentrer l’innovation en France. Une entreprise qui reçoit des aides publiques ne pourra pas se vendre à une société étrangère pendant dix ans.
– Recentrer le Crédit impôt recherche vers les PME et les startups
– Diriger une part de l’assurance-vie (2 %) vers le capital-risque et les startups.
– Inciter les grands groupes à créer leur propre fonds d’investissement dans les entreprises innovantes.
– Fusionner la carte vitale biométrique avec la carte d’identité pour lutter contre la fraude.
– Fin de Hadopi et ouverture d’un « chantier de la licence globale ».
– Soutenir l’investissement dans le très haut débit.
Emmanuel Macron – Tech tonique !
Ses coups de com’ : Jamais sans ses iPhones et son MacBook, Macron (393 000 abonnés sur Twitter, 110 000 sur Facebook) est un geek et ne s’en cache pas. Son lien avec la communauté tech ne date pas d’hier. Fidèle du CES Vegas, il a beaucoup fait pour le secteur des start-up. Ses propositions font ressortir trois grandes priorités : amplifier la dynamique de l’innovation, réformer le fonctionnement de l’État et utiliser le digital dans tous les pans de l’action publique.
Sa vision :
Sa stratégie numérique témoigne de sa connaissance du secteur. Pour son grand porte-à-porte lancé en avril, il s’est appuyé, comme Hollande en 2012, sur le logiciel 50+1 de la société Liegey Muller Pons. Cet outil lui a permis de croiser quartiers, résultats électoraux et taux de chômage notamment, pour aller à la rencontre des abstentionnistes qu’il veut reconquérir. Son mouvement En marche a créé son propre logiciel qui permet à n’importe quel citoyen de fonder son comité local ou de le quitter en un seul clic.
Ses mesures :
– 10 milliards d’euros investis pour le 100% en ligne d’ici 2022 : démarches administratives et « compte-citoyen » créé pour chacun afin de rassembler sur une même plateforme tous ses droits.
– Inclusion numérique : création d’une « plateforme numérique collaborative » pour les handicapés (accès aux diplômes facilité, partage des bonnes pratiques locales), création d’un réseau d’accompagnement numérique sur tout le territoire pour les populations les plus fragiles.
– Développer l’innovation : agglomérer les dispositifs existants (Crédit impôt recherche, Crédit impôt innovation, dispositif Jeunes Entreprises Innovantes), renforcement du rôle de Bpifrance pour faciliter la transformation numérique des PME et TPE.
– Création d’un fonds pour l’industrie du futur et l’innovation : 10 milliards d’euros financés par la vente d’actions dans des entreprises possédées de manière minoritaire par l’État.
– Création d’un Fonds européen de financement en capital-risque de 5 milliards d’euros pour les startups ; renégociation du Privacy Shield ; création d’une Agence européenne pour la confiance numérique chargée de réguler les grandes plateformes numériques américaines.
– Télémédecine, e-santé : simplification des procédures d’autorisation et de mise sur le marché pour stimuler l’innovation.
– Culture : « Netflix européen » ; Pass Culture jeunes (via une appli) d’un montant de 500 euros financé par les distributeurs et les grandes plateformes numériques.
– Poursuite du Plan France Très Haut Débit.
Jean-Luc Mélenchon : Nerdy !
Ses coups de com’ : le don d’ubiquité, ça fait son petit effet ! Le 5 février dernier, grâce à un dispositif d’hologramme, il apparaissait simultanément à Aubervilliers et à Lyon, au grand dam de sa rivale d’extrême droite, elle aussi en meeting à Lyon ce même soir. Le candidat a attisé la curiosité de plus de 22 000 visiteurs en simultané sur son direct Facebook, 43.000 sur YouTube où son apparition se hissait au rang des vidéos les plus populaires le lendemain. S’il n’a qu’un seul téléphone portable (équipé d’un système de cryptage), un seul ordinateur et une webcam, le candidat a depuis longtemps la conviction que le Web est un vecteur de mobilisation ultra-puissant. Il a été le premier à utiliser en France la plate-forme NationBuilder un outil qui sert à diffuser des messages ciblés à différents publics et à collecter des fonds. Sa webTV (140 000 abonnés sur Youtube, un record) et son blog qu’il alimente lui-même cartonnent. Son long travail de développement de sa communauté sur les réseaux sociaux a très bien fonctionné et il a efficacement créé le buzz.
Sa vision :
Soutenir le développement du numérique en luttant contre l’ubérisation, l’hégémonie des GAFA et les menaces sur le travail, l’emploi et la souveraineté de la France; « rendre le continent numérique au peuple ».
Ses mesures :
– Généraliser l’open data pour tous et le logiciel libre dans le public, mettre fin aux contrats entre Microsoft, l’Etat, l’éducation et la défense.
– Economie collaborative pour faire face aux pratiques anti-concurrentielles des GAFA.
– Créer un standard des CGU pour mieux informer sur l’utilisation des données personnelles.
– Fin de la loi Hadopi et réforme du droit d’auteur; système de rémunération global via une cotisation prévue dans l’abonnement Internet.
– Suppression du méga-fichier d’identité TES, lutte contre la surveillance généralisée des citoyens par l’État.
– Couverture en très haut débit du territoire d’ici à 2022.
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